Les MISSIONS des jésuites

LES OEUVRES

La mission d’assistance :

  • le recueillement des enfants abandonnés
  • l’accueil des pèlerins
  • le service hospitalier (frères infirmiers et frères pharmaciens, herboristes réputés)
  • la visite des malades et des pestiférés
  • la visite des prisons et l’accompagnement des suppliciés

Sacerdoce, prédication et aumônerie

  • de nombreuses paroisses desservies (jusqu’à Gornac, Hostens ou Gujan etc.)
  • de nombreuses associations de laïcs, prêtres ou étudiants rattachés à la
  • « Congrégation de la Vierge »
  • une association plus restreinte dite « Aa »(Assemblée des amis)

Participation à des travaux d’érudition et de culture

  • le théâtre : deux représentations par an. Pièces de circonstance, écrites par les Pères,  qui attiraient un nombreux public (« Expression de la poésie baroque, elles mêlaient les passions religieuses aux influences antiques pour le triomphe de la vraie foi »)
  • des ouvrages de théologie, de morale, de sciences et arts, surtout en latin

Apostolat et « missions du dehors »

  • de 1630 à 1645, le nombre des Jésuites de la province passe de 330 à 380
  • ils écrivent dans les langues de leur pays de mission (basque ou anglais)

 

Mission Educative :
Ratio Studiorum

Il fixe les programmes officiels en accordant une large place aux courants novateurs (Rabelais, Montaigne…), les adaptant aux circonstances locales.
L’enseignement est donné gratuitement à des classes d’âges conduites chacune par un programme défini et progressif.

  • Classe de grammaire pour le latin, langue universelle.
  • Classe des humanités pour bien sentir.Classe de rhétorique pour bien dire.
  • Classe de philosophie pour former « l’honnête homme », selon l’idéal du 16ème siècle.Une pédagogie novatrice dont l’ambition est d’éveiller et de guider les intelligences en laissant à l’élève une grande part d’activité et d’initiative.

Développant des habitudes de travail personnel par la fondation, dès 1655, d’une bibliothèque.

Suscitant l’émulation par des récompenses et des pénalités.

Accordant une part égale aux heures de classe et au temps réservé aux jeux….. de boules, de paume, de barres mais aussi la choule, l’escrime, l’équitation, la danse…. dans une cour aménagée au centre du collège. 

Promouvant le théâtre comme symbole le plus expressif de l’éducation par le jeu, pour cultiver la voix et le geste et développer l’art oratoire. 

Préparant à un engagement dans la vie active : l’enseignement se fait aussi pratique pour répondre à l’attente des élèves qui se destinent au négoce, à l’armement, au commandement militaire.


 

ESPRITS DES LIEUX

La pédagogie jésuite de l’âge classique au XXe siècle : les continuités d’un modèle.

L’organisation pédagogique au sein des collèges de la Compagnie de Jésus fut exprimée par écrit pour la première fois dans le RATIO STUDIORUM en 1586. Elle s’inscrivait alors  dans le double courant de l’âge classique : celui de  l’humanisme et celui la Contre-Réforme. « …les Jésuites avaient opté pour un humanisme de culture et de formation… » (F. de Dainville, 1978). Les maîtres mots de cette éducation qui se voulait un instrument de christianisation «  des facultés personnelles… » (Woodrow 1984) furent : la volonté, la liberté, l’intelligence. Du collège classique aux collèges du XXème siècle des continuités se sont exprimées dans les pratiques pédagogiques.

De l’âge moderne à la période contemporaine, dans ces lieux organisés pour le savoir, l’acte éducatif fit alterner des binômes complémentaires et fondateurs. Tout d’abord  l’alternance du silence et de la parole. Le silence était celui de l’écoute des enseignements initiaux comme celui des évaluations personnelles, et dont les lectures publiques de notes en division furent un héritage jusqu’au tournant des années 1968-1975 (dans le cas de Saint-Joseph-de-Tivoli). La parole et son éducation ont toujours occupé une place centrale dans la pédagogie jésuite. Exercices et mises en pratique, tels étaient les deux temps forts de l’éducation à ces « sciences parlières » (de Dainville 1978). Le débat contradictoire face aux propositions de la pensée antique confrontée à celle du christianisme était destiné à forger l’esprit critique des élèves face à la modernité et aux idées montantes des Lumières. Le discours, la discussion organisée, la compétition orale dont les temps forts furent encore après les années cinquante, les « concertations » (Deux classes étaient opposées en présence des parents. Chaque élève devait prendre en charge une épreuve dans les joutes oratoires). La parole toujours, avec le théâtre, puis le commentaire, le dialogue et le questionnement initiés par l’audio-visuel dans Tivoli d’après 1970, et enfin l’initiation aux évaluations orales.

Le second binôme pédagogique combinait la routine et l’épreuve. La routine des entrainements construisait l’habitus des méthodes intellectuelles.  L’épreuve  revenait comme une rupture pour exprimer le meilleur du savoir acquis  et de la maîtrise des méthodes. La force du modèle qui a perduré dans ses adaptations aux changements sociaux, tenait d’abord dans les continuités de l’apprentissage régies par  une organisation routinière du temps pédagogique dénommé  « diligence ». La diligence sanctionnait le travail d’apprentissage. Son origine remontait à  la « décurie » des collèges de l’âge classique. Elle était placée sous la responsabilité d’un décurion. Le collège jésuite transposait ainsi  l’ordre militaire de la légion romaine dans l’univers pédagogique de la discipline et du travail routinier de la récitation. Le professeur avait initialement amorcé une prelectio, l’élève avait pratiqué une lectio et le décurion assurait le relectio. Dans ce binôme routine-épreuve, la diligence alternait avec l’excellence dans une même logique méritocratique : celle des classements. Les proclamations bi-trimestrielles sanctionnaient en public ces deux logiques. Plus fondamentalement ce binôme du travail, s’inscrivait progressivement dans un troisième binôme. En effet, les savoirs et les pratiques évoluaient graduellement d’une logique de contrainte vers l’éducation à l’autonomie. Dans sa logique d’encadrement, la contrainte routinière des éphémérides rigoureuses  programmait pour tous le découpage cyclique de la vie scolaire en encadrant la répétition des exercices et des épreuves. Dans sa recherche d’éthique de responsabilité l’autonomie relative et progressive s’expérimentait hors de la « division »  (lieu de l’étude par année scolaire) pour s’exercer dans des responsabilités extrascolaires, dont le système des « équipes » en autodiscipline fut une heureuse application que connut Tivoli jusqu’à la fin des années 60.


De Dainville, François, (1978), L’Éducation des Jésuites XVIe-XVIIIe siècles, Paris, Les Éditions de Minuit,

Rodier, Philippe, (2011), Le Goût de l’excellence. Quatre siècles d’enseignement jésuite en France, Ed. Beauchesne.

Woodrow, Alain, (1984) Les Jésuites, Paris, J.C. Lattès,

(Michel FAVORY)

Aller à : De 1572 à 1762 Âge classique