De 1572 à 1762 Âge Classique

Les débuts

La Compagnie de Jésus, appelée à Bordeaux par l’archevêque Prévost de Sansac,  dans un contexte de Guerres de religion, y installe son premier Collège en 1572, dans les locaux de l’hôpital Saint-Jacques, traditionnelle étape des pèlerins de Saint-Jacques, à l’angle des Fossés (aujourd’hui Cours Victor-Hugo) et de la rue du Mirail. Il prendra le nom de la Madeleine, du nom de la chapelle du prieuré Saint-James auquel il est uni en 1573 .

Plaque du tombeau de Mgr Antoine Prévost de Sansac, à la Cathédrale Saint André de Bordeaux
À la mémoire  d'Antoine PREVOST de SANSAC, 
 Archevêque de Bordeaux, 
 Prélat d'Aquitaine 
 1560-1591
 Son corps repose en cette église primatiale, 
 près du grand autel du côté du midi.
 "Ce bon archevesque estoit grandement aymé
  du peuple et de tous les gens d'honneur.
  Il fut pleuré et regretté autant que jamais
 prélat fut, car il ne fut jamais haî de personne"
 (Darnal, chronique bourdeloise)
1er plan du collège, BnF

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b531067040/f1.item.r=PLAN%20Coll%C3%A8ge%20j%C3%A9suite%20BORDEAUX.zoom

Ce premier Collège compte 500 écoliers dès l’ouverture, et il est incorporé à l’Université de Bordeaux, comme son rival le Collège de Guienne (le Collège de Michel Montaigne).

            Dès 1579, le Prieuré de Saint-Macaire lui est rattaché (ce qui permet d’améliorer la situation financière) et c’est là que les Pères se retirent lors d’une 1ère expulsion par ordre d’Henri III en 1589.

            En 1603, après l’édit de Rouen, forts de la faveur d’Henri IV, les Pères rouvrent le Collège de la Madeleine qui devient pour plus d’un siècle un centre de vie intellectuelle renommé et rayonnant. Il compte en 1610, plus de 1200 élèves. L’enseignement est gratuit, les élèves appartiennent à toutes les classes de la société.


Les jésuites et leurs œuvres : le temps fort du XVIIe siècle

La Compagnie de Jésus est un ordre religieux fondé par Ignace de Loyola, reconnu par le pape Paul III en 1540, qui n’avait pas au départ de projet éducatif. Mais très tôt, Ignace et ses compagnons comprirent la nécessité d’inclure une mission éducative dans la constitution de l’Ordre. Les premiers Collèges jésuites comme La Madeleine, improvisèrent. Puis sous le généralat du Père Aquaviva (1581-1615) diverses commissions de toutes les provinces travaillèrent à la rédaction du Ratio Studiorum qui fixait le programme et les méthodes d’enseignement, et dont la première édition parut en 1599. A part quelques retouches et adaptations, le texte ne fut pas changé jusqu’à la suppression des collèges en 1762.

Extraits du Ration Studiorum

Le Ratio fixe les programmes officiels en accordant une large place aux courants novateurs (Rabelais, Montaigne…), les adaptant aux circonstances locales.
L’enseignement est donné gratuitement à des classes d’âges conduites chacune par un programme défini et progressif.
 Classe de grammaire pour le latin, langue universelle.
 Classe des humanités pour bien sentir.
 Classe de rhétorique pour bien dire.
 Classe de philosophie pour former « l’honnête homme », selon l’idéal du 16ème siècle.
Une pédagogie novatrice dont l’ambition est d’éveiller et de guider les intelligences en
 Laissant à l’élève une grande part d’activité et d’initiative.
 Développant des habitudes de travail personnel par la fondation, dès 1655, d’une bibliothèque.
 Suscitant l’émulation par des récompenses et des pénalités.
 Accordant une part égale aux heures de classe et au temps réservé aux jeux….. de boules, de paume, de barres mais aussi la choule, l’escrime, l’équitation, la danse…. dans une cour aménagée au centre du collège.
 Promouvant le théâtre comme symbole le plus expressif de l’éducation par le jeu, pour cultiver la voix et le geste et développer l’art oratoire.
 Préparant à un engagement dans la vie active : l’enseignement se fait aussi pratique pour répondre à l’attente des élèves qui se destinent au négoce, à l’armement, au commandement militaire.


Outre  la mission d’éducation qui nous intéresse ici en premier lieu, les Jésuites développèrent au XVII e siècle d’autres missions « intérieures » , aussi bien que des missions « du dehors » : dans les régions protestantes, en Amérique ou en Chine…


QR-CODE : Un collège construit en vue de servir à l’éducation

Au siècle « des Lumières »

            A la fin du règne de Louis XIV, les effectifs du Collège commencent à baisser. La concurrence, l’appauvrissement du royaume et en particulier du port, des problèmes de recrutement, la révocation de l’édit de Nantes conduisirent les Jésuites de Bordeaux à s’adapter, et en particulier à créer un pensionnat dès 1701, puis dans les locaux même du Collège en 1717.

            Le début du XVIIIe siècle connaît un nouvel épanouissement. Dans les congrégations mariales, les associations plus restreintes dites « Associations des Amis » (Aa), favorisent le renouveau de vie catholique.

              Mais l’esprit du Siècle des Lumières soufflait… Les protestants redevenus très influents, les loges maçonniques, les communautés juives imposaient tolérance et ouverture. Puis la condamnation par le Parlement d’Aix de la Compagnie de Jésus, suite à la banqueroute d’une maison de commerce à Marseille crée par le supérieur des Missions de l’Amérique du Sud, entraîna la suppression de la Compagnie par le Parlement de Paris, puis de celui de Bordeaux le 26 mai 1762.

            En 1764, un édit royal supprimait la Compagnie pour tout le royaume. Ses biens furent mis sous séquestre, les établissements fermés, les congrégations mariales dissoutes. C’ est pourtant  l’élite de l’Aa bordelaise qui traversa la Révolution, qui contribua à jeter les bases de l’Église concordataire, et qui  perpétua l’esprit missionnaire.


Témoins architecturaux dans la ville

            De cet âge classique il reste :

Le Collège de la Madeleine  avec sa belle ordonnance de 1698, dont témoigne toujours la façade de l’actuel Lycée Michel Montaigne : « deux ailes à trois étages avec des entrées surmontées de frontons cintrés rejoignaient les deux pavillons d’angle ornés de médaillons représentant les Pères jésuites »; le pavillon central où se trouvaient la chapelle du collège et sa bibliothèque était percée d’une entrée majestueuse surmontée dans une niche d’un buste de Saint-Ignace ».


Collège de la Madeleine actuel Lycée Michel Montaigne

QR-CODE : Collège de la Madeleine


La magnifique église baroque Saint-François-Xavier (1663-76), aujourd’hui Saint-Paul, sise à côté de la Maison Professe  installée sur l’ancienne Mairerie de Bordeaux, aujourd’hui presbytère de l’église Saint-Paul.  Le tympan au-dessus de la porte d’entrée porte un cartouche bûché à la Révolution où se devine encore la devise de la Compagnie de Jésus.

La décoration intérieure est du milieu du XVIII e s. : notamment  le retable à baldaquin de Pierre Vernet, le tabernacle en marbre vert et bronze doré et l’apothéose de Saint-François-Xavier, chef d’oeuvre de Guillaume Coustou.


QR-CODE : Eglise Saint-Paul-Saint-François-Xavier


Plaque murale sise à l’église Saint Paul-Saint-François-Xavier
le bras est retourné à Rome en 19…


1606 Noviciat

En savoir plus… Le noviciat


Et à Tivoli,  que nous reste t-il de cette époque ?

– Le Collège a toujours conservé jusqu’à la fin du XXe siècle, les ossements du Père Surin (cf article de Paul Defaye), désormais remis aux Archives Jésuites.

le Père Surin, s.j. (1600-1665)


Correspondance, Paris, DDB, 1974 (réédition de M. de Certeau)

En savoir plus : Le Père Surin,s.j.


– Un coutumier de 1682 vient d’être retrouvé : il est le seul témoin matériel actuellement en notre possession de cette période.